Après plusieurs semaines de confinement et pour la plupart des entreprises un ralentissement voir un arrêt total de l’activité, la reprise est annoncée au 11 mai 2020.

Malgré cette annonce, le gouvernement n’a, à ce jour, que très peu communiqué sur les conditions de cette reprise de l’activité.

Alors, comment anticiper cette reprise, marquée par l’envie de rebondir mais également la peur d’une nouvelle vague épidémique ?

Plusieurs questions se dessinent déjà tant pour les employeurs que pour les salariés :

1. L’activité doit -elle nécessairement reprendre au 11 mai 2020 ?

A titre préliminaire, le 11 mai 2020 a été annoncé comme une date « objectif » et non une date butoir. Un prolongement du confinement est donc à envisager au-delà de cette date.

A ce jour, le plan de déconfinement progressif n’a pas été communiqué au grand public. Nous savons néanmoins que certaines activités, comme la restauration, ne seront pas concernées par cette réouverture. Des mesures différentes devraient par ailleurs être mises en place en fonction des territoires.

La région Rhône-Alpes étant relativement touchée par l’épidémie, nous pouvons craindre un déconfinement moins ouvert que dans certaines régions, moins touchées.

Pour les activités qui ne seront pas concernées par la reprise, les mesures de chômage partiel demeureront en vigueur. Pour les autres, l’activité devra reprendre et l’entreprise ne devrait plus pouvoir bénéficier du recours au chômage partiel dans le cadre du COVID-19.

Bien sûr, certaines activités (comme les fournisseurs de produits alimentaires réservés aux professionnels) resteront impactées par la fermeture de leurs clients. Nous pouvons espérer que ces activités pourront continuer de bénéficier du chômage partiel afin d’envisager une reprise progressive de leur activité. C’est donc une analyse cas par cas de la situation que doit être envisagée.

Une reprise progressive sur la base du volontariat et des besoins des entreprises pourrait être envisagé, sous réserve des mesures qui seront prises par le gouvernement.

2. Les salariés peuvent-ils refuser de venir travailler ?

Dans l’hypothèse d’une reprise d’activité autorisée par le gouvernement, les salariés devront revenir travailler.

Toutefois, il a déjà été annoncé qu’il reviendra à chaque structure d’organiser des conditions de reprise du travail de nature à garantir la santé et la sécurité des travailleurs.

Les salariés pourront donc utiliser leur droit de retrait pour refuser de se rendre à leur travail s’ils estiment que les mesures mises en place ne sont pas suffisantes pour préserver leur santé et leur sécurité face aux risques pandémiques.

A savoir, il n’appartient pas à l’employeur de garantir les conditions dans lesquelles le salarié se rend de son domicile à son lieu de travail. Un salarié, devant prendre les transports en commun pour venir travailler, ne pourra pas opposer cet argument pour éviter la reprise, sous réserve que sa présence physique dans les locaux soit nécessaire.

En effet, il a également été annoncé que le recours au télétravail devra demeurer tant que cela est possible.

3. Comment aborder la reprise de mon activité ?

Nous vous conseillons d’établir un plan de déconfinement selon vos propres contraintes, sous réserve des préconisations du gouvernement. Il convient de rappeler que l’employeur est tenu envers les salariés d’une obligation de sécurité renforcée. Il vous appartient donc à ce titre de tout mettre en œuvre pour organiser une reprise dans les meilleurs conditions sanitaires possibles.

L’association des membres du CSE et à défaut du personnel peut constituer une solution efficace pour éviter que la peur d’un retour au travail ne se propage chez les salariés.

En tout état de cause, nous vous conseillons de communiquer aux salariés votre plan de déconfinement avant la reprise.

4. Comment traiter les personnes à risque ou ayant été atteint du COVID-19 ?

L’état de santé du salarié reste une donnée confidentielle. Les mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire ne permettent pas à l’employeur d’exiger que les salariés communiquent leur état de santé et notamment s’ils ont été atteints ou en contact avec une personne atteinte du virus.

Néanmoins, il est important d’inviter les personnes à risque à se faire connaitre pour que des mesures spécifiques soient prises. A ce stade, nous ne savons pas si les arrêts de travail pour les personnes à risque seront renouvelés au-delà du 11 mai.

Dans l’hypothèse où ils ne le seraient pas, nous pensons que l’employeur doit rester prudent et privilégier le télétravail pour ces personnes, et à défaut prévoir des mesures de nature à limiter les contacts du salarié avec le reste du personnel et d’éviter le contact avec le public.

Concernant les personnes ayant été infectées ou en contact avec des personnes infectées, ces derniers n’ont aucune obligation à ce jour de communiquer sur leur état de santé. Ils doivent néanmoins être invités à la faire pour que des mesures « d’isolement » soient prises. Attention, aucune discrimination ne doit pour autant intervenir.

En tout état de cause, l’employeur devra respecter la confidentialité des données recueillies.

Afin d’envisager la reprise, nous pouvons d’ores et déjà vous inviter à réfléchir sur les mesures suivantes :

  • Distanciation sociale : Une distance de 1 mètre est aujourd’hui préconisée (soit 4m² par personne (salariés, clients, fournisseurs). La reprise du travail ne peut être envisagée que si cette distance est respectée. Pour cela, plusieurs pistes sont à étudier :
    – Instaurer un sens de circulation dans l’entreprise- Limiter les réunions (fréquence et nombre de participants)
    – Privilégier le télétravail (qui devrait demeurer le principe pour encore quelques mois)
    – Décaler les temps de pause (roulement)
    – Mettre en place des horaires décalés
    – Limiter l’accès du public
    – Adopter une nouvelle répartition des salariés partageant des bureaux (nouvelle organisation des bureaux, transferts de certains salariés dans des salles de réunions habituellement vides, mise à profit d’espaces vides)
    – Encourager la prise de repas en dehors des locaux et limiter l’accès des salles de repas à un certain nombre de salariés à la fois
    – Eviter les goulots d’étranglement en gérant les flux et les temps d’attente (exemple : planning d’accès au photocopieur commun avec décontamination par l’utilisateur après usage (il peut être prévu que l’utilisateur se désinfecte les mains avant et après utilisation avec port du masque obligatoire pendant l’utilisation)…

 

  • Equipements :
    – Communication régulière et intensive des gestes barrières (affichage, note interne, formation…)
    – Mise en œuvre de mesures de nettoyage renforcées
    – Mise à disposition de protections : gants, masques, visières, blouses, lunettes…
    – Mise à disposition de produits d’hygiène : savon, essuie -mains à usage unique, gel hydroalcoolique…
    – …
  • Mobilisation des salariés :
    – Associer les salariés et les membres du CSE à la reprise (questionnaires, boites à idées…)
    – Mise en place d’une cellule psychologique (certains salariés font d’ores et déjà part de leur angoisse quant à la reprise)
    – Faire intervenir la médecine du travail et un psychologue du travail
    – Encourager les salariés présentant des symptômes ou ayant été en contact avec une personne ayant eu des symptômes à consulter un médecin et à renforcer les mesures de distanciation sociale
    -…

La reprise de l’activité s’annonce particulièrement difficile tant pour des raisons économiques que sanitaires. Il convient donc de l’anticiper au mieux pour s’assurer un déconfinement réussi.

 

Mise à jour : Après la publication de cet article, le gouvernement a publié un protocole national de déconfinement. Nous vous invitons à consulter ce document https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/protocole-national-de-deconfinement.pdf